“Un Opéra est plus que jamais un centre de ressources, un repère de culture partagée et de citoyenneté.”
Dans le cadre du projet européen EducOpera, l’Opéra de Massy cherche avec ses partenaires français, danois, espagnols, italiens et slovènes à combattre le décrochage scolaire par le biais de la sensibilisation à l’opéra. Nous avons posé quelques questions à Marjorie Piquette, responsable de l’Action éducative à l’Opéra de Massy et Bénédicte Halba, présidente fondatrice d’iriv et directrice d’iriv conseil.
Pourriez-vous nous résumer le projet en quelques mots ?
EducOpera est un projet d’étude dans le cadre de l’Éducation et la Formation tout au long de la vie soutenu par Erasmus +, dont le leader est l’Opéra de Massy et le partenaire français iriv conseil. Cinq pays européens sont impliqués : France, Danemark, Espagne, Italie, et Slovénie.
Il a pour but de proposer une pédagogie innovante aux éducateurs au sein de l’école et en dehors pour lutter contre le décrochage scolaire par la sensibilisation à l’Opéra.
Quelles étaient vos principaux objectifs ?
Le projet s’échelonne sur deux ans (2017-2019). Les objectifs de cette première année sont de mettre en œuvre un outil et une méthode pour identifier et évaluer les compétences acquises par des adolescents (13-15 ans) grâce à une sensibilisation à l’Opéra. Différentes sessions pédagogiques leur ont été proposées. La deuxième année, un tutorat sera développé qui permettra aux éducateurs de pouvoir utiliser au mieux cette approche pédagogique. Un guide permettra enfin de synthétiser les approches pédagogiques en intégrant les retours d’expériences dans les 5 pays partenaires qui auront testé l’outil et le tutorat.
Comment ont-il évolué au fil de cette première phase et comment envisagez-vous la phase 2?
Cette première année a consisté à proposer des ateliers d’initiation à l’opéra (chant, danse, théâtre) à des adolescents volontaires. Ces ateliers ont permis de travailler sur l’outil et la méthode EducOpera qui sera formalisée par le partenaire français iriv conseil. Chaque pays européen est libre d’appliquer la méthode qui lui semble la plus adaptée.
L’année prochaine, le tutorat proposé aux éducateurs et professionnels de l’enseignement sera également testé dans les 5 pays.
In fine, un guide d’utilisation sera publié en anglais et s’adressera à des acteurs clés en Europe intervenant dans le champ de l’éducation et de la formation tout au long de la vie, avec un accent sur la lutte contre l’échec scolaire.
Quels sont les publics avec lesquels vous travaillez dans le cadre du projet ?
Nous travaillons avec des élèves volontaires de quatrième, scolarisés au collège Blaise Pascal de Massy en quartier REP. Ce collège est à quelques centaines de mètres de l’Opéra.Le personnel éducatif est également engagé dans le projet d’étude.
Les élèves ont le même âge – 13 à 15 ans- dans les 5 pays. Les partenaires travaillent soit directement avec les écoles soit par le biais d’écoles de musique soit par des associations artistiques.
Le public des professionnels est constitué de professeurs enseignant dans les écoles secondaires du premier degré (élèves de 13 à 15 ans), dans des conservatoires, dans des associations, dans des collectivités proposant des activités de soutien scolaire ou d’accompagnement à la scolarité (réussite éducative).
Quels sont vos partenaires ?
Nous avons cinq partenaires européens : iriv conseil à Paris ; l’Université de Pérouse en Italie, un organisme de formation en Espagne, l’Université d’Aarhus au Danemark , et l’Institut de recherche ZRC SAZU en Slovénie qui travaillent simultanément sur les même objectifs avec leur publics scolaires ou associatifs.
Toutes les informations sur les partenaires sont accessibles sur : http://www.educopera.eu/
Comment décririez-vous votre travail avec ces partenaires ?
Le travail avec nos partenaires européens est très collaboratif. Une première rencontre a permis de se présenter « physiquement ». Une première version de l’outil a été proposée par iriv conseil ce qui a permis de collecter de premières informations nationales (en matière de lutte contre l’échec scolaire, de contextes de l’enseignement musical…). Une version plus aboutie sera accessible la première semaine de mai avec les retours sur le terrain de la première expérimentation- la France est très en avance avec une série de 7 sessions déjà organisées. Une réunion en juin au Danemark permettra d’échanger sur l’état d’avancement du projet.
Quels sont les outils que vous utilisez pour évaluer la réussite ou non des activités réalisées ?
Une évaluation externe est prévue par un évaluateur slovène qui permettra de vérifier si les publics concernés ont été impliqués- groupes d’élèves et éducateurs. Les retours des partenaires- données et informations demandées seront collectés avec une comparaison sur la qualité des retours. Des tests complémentaires le cas échéant seront demandés aux partenaires.
L’Opéra de Massy est membre de RESEO depuis 15 ans . Quel a été l’impact de l’adhésion à un réseau européen sur vos activités éducatives ?
L’Opéra de Massy est le plus jeune Opéra de France, avec la particularité d’être situé dans une ville de banlieue parisienne et dans un quartier prioritaire. Il a été dès sa première saison un laboratoire d’actions culturelles et il était naturel de faire connaître nos actions et les partager avec nos homologues.
L’impact de RESEO est très bénéfique car il permet un échange réciproque d’expériences et de savoirs. Grâce à RESEO, notre partenaire espagnol a pu rentrer en contact avec l’Opéra de Madrid. Les autres partenaires ont mobilisé leurs propres réseaux.
L’opéra serait “la plus européenne des formes artistiques”. Selon vous, qu’apporte cette dimension européenne aux actions éducatives, en comparaison avec les projets principalement locaux ou nationaux ?
Un Opéra est plus que jamais un centre de ressources, un repère de culture partagée et de citoyenneté. L’Opéra fait tomber les frontières culturelles et encourage l’audace de la création, le mélange de styles, des arts. En cela l’Opéra est européen et plus généralement universel.
L’Opéra est né en Europe et ses langues de prédilection sont l’italien, l’allemand , le français et l’anglais – toutes des langues européennes.
RESEO abordait lors de sa conférence d’automne 2017 la notion de “coopération créative”, autrement dit de création de projets entre structures artistiques, ainsi qu’en partenariat avec les écoles, communautés, villes et individus. Qu’est ce qui fait selon vous la réussite d’un projet collectif ?
La coopération créative pourrait résumer le travail quotidien mené à l’Opéra de Massy car il est connecté à tous les équipements culturels et sociaux de la ville. Si l’Opéra permet par exemple à deux univers qui ne se connaissaient pas de se rencontrer et se fréquenter il y a déjà une victoire remportée : « Grâce à l’Opéra, j’ai découvert une passion pour tel instrument, un métier que je ne pensais pas fait pour moi, mais aussi grâce à l’Opéra j’ai amélioré mes relations avec ma classe, je m’exprime mieux à l’oral…
Le projet EducOpéra se propose, à partir de l’expérience originale et réussie de l’Opéra de Massy, de pouvoir comparer les approches dans des pays voisins et sensibles à la culture artistique- Italie, Espagne, Danemark (un Opéra très moderne a été construit à Copenhague), et en Slovénie (où la scène artistique est très avant-gardiste)
EducOpera se base sur le principe que l’éducation musicale favorise le développement cognitif, émotionnel, physique et social des jeunes, idée qu’aborde actuellement RESEO dans son travail sur l’apprentissage socio-émotionnel. Quels sont selon vous les bénéfices spécifiques à l’éducation à l’opéra ?
Une éducation à l’Opéra permet de mobiliser des compétences multiplies :
– Artistiques : chant, musique, danse, mise en scène, décors et costumes
– Techniques : mise en scène, décors, sons et lumières,
– Managériales : financement des spectacles- mécénat, subventions publiques, billetterie, co-productions…
L’éducation à l’Opéra proposée par le projet EducOpéra est plus proche des métiers de l’Opéra présentés lors d’un précédent projet européen auquel l’Opéra de Massy s’était associé : Schola où des promotions de collégiens du collège Blaise Pascal ont assisté toute l’année à des sessions mensuelles d’initiation au bénévolat.
Auteures : Marjorie Piquette, responsable de l’Action éducative à l’Opéra de Massy et Bénédicte Halba, présidente fondatrice d’iriv et directrice d’iriv conseil